3 juin 2007

Slowdive : Just for a day


Just for a day de Slowdive
Sortie : 1991
Produit par Chris Hufford
Label : Creation Records


Alliant une extrême douceur dans le ton, voire une certaine nonchalance romantique, avec une exubérance sonore virant à la surcharge d'effets, la musique de Slowdive est sublime de langueur. D'autant que les structures étirées, presque volontairement neurasthéniques, sèment le trouble et embrouillent les pistes, pour ne conserver que finesse, luxe et magie.
Encore plus audacieux, plus radicaux et sans doute plus perturbés que ses contemporains, Slowdive réussit à créer une musique unique et jamais égalée depuis. Comme beaucoup, le groupe s'inscrivait dans un courant musical appelé shoegaze, mais le porta vite aux nues pour faire de son œuvre la plus incroyable et belle déposition jamais faite de beauté absolue, s’écartant des chansons traditionnelles, pour proposer des miracles. Apprêté, avec ses violons, ses distorsions, sa batterie lente et répétitive, sa guitare sèche, « Spanish Air » est un modèle du genre. Quant au chant, doucereux, ambigu et virginal, il permet des dialogues extraordinaires entre Neil Halstead et Rachel Goswell, parfois dédoublées sur plusieurs tons (« Ballad of sister sue »). 
Les guitares ont la part belle et l'hyper-saturation est de mise pour créer un véritable mur du son dont il est très difficile de s'extraire sans être marqué à jamais. Mais faire du bruit ne signifie pas toujours jouer vite ou avec fracas. Chez Slowdive, justement, ce qui prime relève plutôt de l’armature, chargée, poussant au confinement et très majestueux. L'ensemble est finement travaillé et au service de chansons impeccables, au charme intemporel où la grâce se dispute au divin (la basse mythique de « Catch the breeze » ou de « Brighter »). Hautement mélodique, très lente et vaporeuse, la poésie est au rendez-vous, conférant aux titres un éther doux et suave, saveur garantie par des voix caractéristiques, très éthérées et presque angéliques, celle de Neil Halstead et de la divine Rachel Goswell (« Celia’s dream », fantasmagorique et traversée d’éclats d’un autre monde, ou « Waves »). A l'extrême opposé de la violence instrumentale environnante, elles tirent vers des sommets d'élégance trouble et fragile. Il arrive même que l’abstraction soit telle qu’il n’y ait plus de batterie (« The Sadman »), ni de chant (« Erik’s song »). Les structures classiques couplet-refrain sont abandonnées, pour mieux entraîner l'auditeur vers un tourbillon et le perdre dans le chamboulement émotionnel que provoque cette vague remuante. On reste souvent ébloui par tant de vigueur lié à un raffinement infini.

Même si l’écoute est parfois éprouvante, s’abandonnant vers l’abstraction progressivement et s’évanouissant complètement sur la fin, on a sans cesse l'impression de côtoyer la féerie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire