30 juin 2008

Fiche artiste de Swallow


Swallow

Comme souvent finalement dans le shoegaze, Swallow est avant tout l’affaire d’un couple.
Mike Mason et la vocaliste Louise Trehy formeront donc un duo au sein de la scène indépendante anglaise. Lui, bidouilleur, touchant un peu à la guitare et goutant du synthé ; elle, mystérieuse et au chant angélique.
Privilégiant au mieux les nappes éthérées à base de guitares comme de touches electro, Swallow condensera en un album toute la personnalité du label 4AD, sur lequel ils avaient signé au début des années 90. A la fois tendrement excessive et paresseusement exigeante, leur musique les rapprochera de My Bloody Valentine ou Curve, mais surtout des Cocteau Twins, évidence qui ne manquera pas d’échapper aux amateurs.
Du coup, cette difficulté de se détacher du style de la maison de disque leur vaudra quelques critiques, à une époque où on attendait autre chose de la part de 4AD.
C’est donc un album de remixes, intitulé « Blowback », qui permettra à Swallow de dévoiler une autre facette de leur talent : tout en reprenant la play-list de leur album « Blow » qui était produit par John Fryer, le duo se lance dans l’expérimental et prend une coudée d’avance sur le monde electro.
Après une séparation avec 4AD, le duo retourne à la maison où il se remettra à écrire et enregistrer. Swallow sera récupéré par Rough Trade qui publiera un EP « Hush ». A noter que ce CD quatre titres contient également une reprise du « Dear Mary » de Steve Miller. Une nouvelle orientation semble s’y dessiner. Et qui se poursuivra avec l’enregistrement d’un futur album, entrecoupé d’une tournée avec Mazzy Star. Malheureusement, le label perdra une partie du matériel, stoppant la poursuite de l’album.
La séparation du couple stoppera quant à elle leur carrière. Depuis Mike Mason continue à travailler dans la musique, au contraire de Louise Trehy.

25 juin 2008

Flying Saucer Attack : Flying Saucer Attack


Flying Saucer AttackSortie : 1993
Produit par David Pearce
Label : Heartbeat


Tout d’abord la pochette, devenu mythique : une vue sur l’atmosphère et ses couches en un dégradé pictural hypnotique. Un appel à l’étrange.
Le contenu l’est tout autant. Sous-produit, brouillon, voire sous forme d’ébauche, ce premier album exerce un énorme pouvoir de fascination. Difficile d’accès, voire même rebutant, il n’en est pas moins exigeant avec l’auditeur. Les guitares sont bruitistes au possible, elles emplissent l’espace et le monopolisent presque, crachant des parasites, jusqu’à étouffer les voix, qu’on entend à peine d’ailleurs. Cette couche sonore opaque efface toute trace de clarté. Face à ce mur du son rebutant, il faut fermer les yeux et se laisser aller.
Etrange, surprenant, le premier album de Flying Saucer Attack est surtout exigeant. Volontiers agressif dans ses propos, du fait d’un brouillage assourdissant et quasi-constant, il mélange esprit abscons et torturé avec simplicité mélodique, dont l’évidence parfois crève les yeux.
L’ouverture déroutante immisce dans les oreilles un fond bizarre constitué du bruit ronflant de machine rétro-futuriste, avant qu’une douce mélodie à la guitare vienne oser faire une apparition. Ça sonne ancien, lo-fi, on a même l’impression d’être tombé sur une vieillerie, ou alors quelque chose qu’on connaît déjà, sans réussir pourtant à mettre le doigt dessus, et pourtant c’est totalement nouveau. L’entrée de la section rythmique (ultra simpliste et imperturbable) permettra l’ajout de charmantes distorsions, fatiguées mais qui ne s’effaceront à aucun moment, recouvrant totalement le chant doux et discret, venu apporter une touche infiniment rêveuse au morceau (« My Dreaming Hill »).
OVNI musical, ce premier essai explore de nouveaux horizons. La bande de Bristol expérimente et va plus loin, en matière de son et de bruit, que ce qui a été fait jusque là dans le shoegaze. La démarche est jusqu’au-boutiste au possible, quitte à noyer ses propos. Et ce n’est pas l’écrasant crépitement sonore qui éclaircira la teneur de l’album. Ce qui prime, c’est l’absence de retenu dans les distorsions, transformant les chansons en apparition quasi-fantomatique (« A Silent Tide »). Car ici, la volonté est de faire exploser les frontières du genre, le rock en général et les guitares en particulier, qui sont détournées à l'extrême pour des structures compressées jusqu'à atteindre de longues plages de saturations sans fin. Sous les crispations et les grincements, des voix susurrent doucement des paroles aussi volatiles qu'inaudibles.
Reprenant le travail de My Bloody Valentine, du krautrock ou de Brian Eno, là où ils l'avaient laissé, ce disque étalon jette les bases d'une expérimentation nouvelle, ouverte aux délires les plus planants comme à l'aventure la plus exigeante. Le résultat est long en bouche, difficile d'accès, tortueux et avare en signaux, sorte d'enfant-monstre hybride et métallique.
Pourtant cette musique sombre et sismique cache nombre de curiosités pour l'époque: du post-shoegazing industriel (« Wish »), des morceaux tribaux à base de bongos, de l'ambient (« Popol Vush », qui évoque tant l’espace qu’une transe cosmique) et même une reprise étonnante et incongrue de « The Drowners » de Suede, bijou poppy passé au mixer.
Traversé de plages obscures, instrumentales et inquiétantes (« Moonset »), l’album éponyme de David Pearce est aussi, et avant tout, une (re)découverte de la beauté éperdue de certains moments de flânerie (l’aérien « Make me dream »), derrière une indolence extrême dans la manipulation des instruments de manière à tout recouvrir de nuages électriques et de signaux non écrêtés.
Sans le savoir, Flying Saucer Attack venait de créer un album de pré-post-rock...

11 juin 2008

Fiche artiste de Slowdive

Slowdive

A l'époque, le NME recevait des centaines de lettres de lecteurs : tous réclamaient la mort des membres de Slowdive ! Qualifiés d'insupportables léthargiques, ils ont été la risée de tout le monde et n'ont fait qu’attiser le rejet autour d'eux, voire la haine pur et simple. 


Aujourd'hui, certains des albums Slowdive sont considérés à juste titre comme des oeuvres fondamentales du shoegaze. De plus, énormément de groupes actuels (nu-gaze, c'est à la mode, ambient, post-rock) se revendiquent de leurs influences. Neil Hastead et Rachel Goswell sont devenus par la force des choses immensément respectés par leurs pairs et par le public, de par leurs albums solos respectifs ou leur projet Mojave 3, grand groupe de folk-country mélancolique. Et pourtant, autrefois, avec Slowdive, chacune de leurs sorties fut manquée, les critiques tirant à boulet rouge sur eux, leurs albums ne se vendant pas. 

Slowdive a toujours été le groupe le plus sous-estimé et le plus mal compris. Fort heureusement leur récente reformation permet de les réhabiliter.

6 juin 2008

Slowdive : Blue Day

Blue Day de Slowdive

Date : 1992
Produit par Chris Hufford
Label : Creation

Pour patienter avant la sortie du deuxième album, Creation a la bonne idée de regrouper sur cette compilation les premiers singles du groupe, alors qu'ils n'étaient encore que des adolescents. Ce qui est frappant avec ces premières chansons de Slowdive, c’est leur maturité étonnante. Les membres ont beau être extrêmement jeunes au moment de leurs écritures, c’est comme s’ils étaient vieux, du haut de leurs expériences, pleins de sagesse et légèrement désabusés. Neil Halstead chante doucement, de façon si posée, que tout ce qu’il susurre apparaît dramatique et solennel. Et autour de lui, il n’y a plus de couplet ou de refrain, mais que des nappes de guitares, des coulées et des nuages filandreux, appuyés par une batterie imperturbable et des tambourins flegmatiques (« Morningrise »).
Slowdive a depuis longtemps quitté les petitesses du monde du rock, ils en sont loin et préfèrent s’adonner à l’abandon. Le groupe construit un mur du son tout simplement confondant de densité, à base de réverb et de saturations, des effets sonores qui se recouvrent les unes aux autres, tandis que la basse et la batterie maintiennent une gravité d’ensemble (« She calls »). 
Les membres de Slowdive, pourtant gamins, restent imperturbables sous le feu de leurs distorsions (l’imposant et magnifique « Slowdive »), où les guitares résonnent dans ce brouhaha lyrique pour un constat nourri de regret. Neil Halstead et Rachel Goswell chantent tous deux de façon à ce que leurs voix angéliques se mélangent, lentement et suavement. 
Les derniers morceaux tirent encore plus vers l’abstraction. Encore plus lentes, ils utilisent les guitares comme des nappes sonores féériques, éthérées et cotonneuses (« Albatross » ou « Golden Hair »), qui préfigurent ce que le groupe fera avec son premier album. Mais il est stupéfiant de constater, qu’en réalité, de nombreux groupes bien des années plus tard vont sonner comme ces premiers singles, reposées et aériens, à l’influence insoupçonnée.