27 août 2008

Fiche artiste de The Jennifers


The Jennifers

Avant Supergrass, Gaz Coombes et Danny Goffey appartenaient à un groupe appelé The Jennifers, alors qu’ils avaient entre 16 et 18 ans !
C’est au lycée de Weatley Park à Oxford que le groupe se forme, avec le guitariste Nic Goffey (frère de Danny) et le bassiste Andy Davies. Influencé par les Buzzocks, les Jams et les Kinks, ces quatre gamins écument les bars jusqu’à se faire remarquer, à un concert au Jericho Taverns, par le producteur Nick Langton.
Celui-ci les emmène au studio Stargoat, près de Banbury, et ils y enregistrent une cassette où figurent trois démos. « I want to fly », qui comprend un sample de lancement de fusée en intro, ressemble à du Stone Roses. « Tell Me » est assez similaire mais se termine en jam sirupeux et basé sur le funk. Quant à la dernière chanson, « She is my world », c'est une ballade qui dévoilera les talents de compositions des jeunes garçons. Le groupe amasse suffisamment de succès (avec notamment des premières parties pour Revolver) pour signer enfin son premier EP sur Nude, le fameux « Just Got Back Today », manifeste shoegaze adolescent.
Peu de temps après, Davies rentre à l’Université et Tara Milton, qui avait remplacé un temps Nic Goffey, finit par partir aussi. Gaz Coombes fait alors appel à Mick Quinn, un autre élève de Weatley Park, qui a déjà écrit et participé à quelques groupes, et ils se découvrent alors des intérêts communs.
Réduit à trois, ils décident alors de se nommer Supergrass.

The Jennifers : Just Got Back Today


Just Got Back Today de The Jennifers
Sortie : 1992
Produit par Chris Hufford
Label : Nude Records

Tout ici montre déjà des signes d’allégresse et de douce folie, et quoi de plus normal finalement pour des jeunes qui formeront plus tard Supergrass, un des groupes les plus barrés de la Brit-Pop.
C’est la jeunesse que respire un morceau comme « Rock Bottoms » avec son groove inimitable, son rythme sous speed et ses guitares acoustiques affolées. Un solo de guitare et hop, le tour est joué : voilà comment on emballe une chanson, avant de reprendre sur un refrain simpliste mais diablement accrocheur. Etre jeune, aller vite et faire la fête, pour beaucoup cela paraît bien pauvre, pour ces zigotos d’à peine dix-huit ans, c’est un idéal.
« Dannys Song » contribuera à rajeunir la pop anglaise, à grand coup de fracas de batterie et de guitares endiablés, soutenu par moment par un délicat petit riff absolument remarquable.
C’est un écran de lumière qui est projeté au cours de cet EP, à l’écoute de ces titres incandescents, dessinant un univers sans ombre, enthousiaste, festif et racé. Légèrement teintées de psychédélisme, les premières chansons de la bande d’Oxford donnent envie de les suivre bien loin.
Aussi bien épurée (des guitares sèches, une orgue, des voix raffinés qui proposent des chœurs gracieux) que nostalgique (l’ambiance sixties et typiquement anglaise, qui évoque ce que fera Blur ou Dodgy), « Tomorrow’s Rain » est une ballade purement exaltée et frénétique.
Mais The Jennifers, c’est surtout et avant tout, une maturité inouïe et une qualité d’écriture étonnante de la part de garçons, même pas sortis de l’adolescence. A ce titre, leur single « Just Got Back Today » se révèle être un vrai miracle, où tout semble parfait.
Il n’y a rien à redire, The Jennifers venait à l’époque de signer une chanson shoegaze magnifique, qui mérite de rentrer pour l’éternité, parmi les plus belles jamais composées. Pour s’en convaincre, une seule mais indélébile écoute suffit et on comprend. Les guitares, ici en mode sèches, mais complétées par un riff électrique lointain et tranquille, accompagnent parfaitement un chant soyeux de chérubins, ouaté et qui se perd dans les méandres d’un xylophone. Les chœurs se font le plus tendres possible, rappelant la langueur innocente de Blind Mr Jones (et ce n'est pas étonnant, puisque c'est le même producteur, l'inévitable Chris Hufford, qui est aux manettes), jusqu’à épater de candeur : « We could be together, but you’ll have to try. We could love each other, but you’ll have to try » résonnent alors comme la requête, tendrement naïve, de quelques adolescents, loufoques certes, mais surtout en mal d’idéaux.

Fiche artiste de Springhouse


Springhouse

Emergeant du proto-groupe punk Even Horse de Jack Rabid (où figura un temps Thurstoon Moore de Sonic Youth !), le trio new-yorkais comprend également Larry Heinemann à la basse et Mitch Friedland au chant et à la guitare. Ces musiciens ne se sont jamais quittés depuis.
Après un premier single, « Menagerie Keeper », sorti sur le label SOL (celui de Bob Mould), le groupe réussit à signer sur Caroline Records pour y sortir un premier album en 1991, et parallèlement ouvre les concerts de quasiment tous les groupes connus de New-York. Le leader de The Chills les considérera comme le meilleur groupe américain, tandis que Bob Mould, en grand fan, reprendra une de leur chanson. Encouragés et plébiscités (grâce notamment à leur tube « Eskimo » qui traite des sans-abris), les membres de Springhouse avoueront pourtant amèrement que cela n’est pas suffisant pour lancer leur carrière. Ils sortiront un deuxième album magnifique en 1993, bien plus percutant et proche de Ride, mais ils resteront méconnus et sous-estimés.
D’un autre côté, difficile pour eux de s’imaginer partir en tournée, eux qui sont nés à New-York, d’autant qu’il leur faudrait mettre en parenthèse leur boulot journalier (assistant d’éducation et critique de rock pour Jack, serveur pour Larry et pharmacien dans le Queens pour Mitch). Croulant sous les contraintes, Springhouse s’effacera dans l’anonymat de la mégapole. Jusqu’à un retour inespéré en 1998.

26 août 2008

Fiche artiste de Bang Bang Machine



Bang Bang Machine

Il est impossible de catégoriser Bang Bang Machine ; c’est un groupe hors du commun qui a brassé énormément de styles pour avoir le sien propre, unique et incomparable. Tout autant basé sur la dance et l’ambient que sur le psychédélisme, le grebo ou la dream-pop, le groupe n’est pas vraiment dans le shoegaze. Mais il n’empêche que leur goût pour les grandes nappes sonores, l’évanescence et les vocalises de déesse, semble indiquer qu’ils y ont puisé largement leurs influences.
Rassemblés en 1989 à Evesham en Angleterre, Elisabeth Freeth (chant), Stan Lee (basse), Lamp (batterie) ainsi que Steve Eagle (guitare), dont on ne soulignera jamais assez le jeu éclairé et l’inventivité de la composition, ils enchaîneront les galères, quémanderont quelques sous pour de rares sessions d’enregistrement, se dépatouilleront aux manettes en autodidactes, avant d’être enfin reconnus en 1991 grâce à une improbable démo, le culte « Geek Love ». Lamp reconnaîtra : « ça nous aura juste pris trois ans afin d’être enfin sur pied ! »[i]. En effet, la chanson tombe par hasard entre les mains de John Peel. Soufflé par ce style improbable et ce vent de psychédélisme sexy et ravageur, il s’empresse de la diffuser dans son émission.  Il faut dire qu'il y a de quoi : un rythme robotique, une basse prenante, des refrains éclatants, un mélange subtil entre le sens de l'accroche de la pop anglaise et ce son hybride électro, des boites à rythme héritées de la dance music et de Madchester, des guitares folles... Et puis la voix d’Elisabeth Freeth, diva incroyable, qui se fait tour à tour enjôleuse ou vigoureuse. Un véritable appel à l’évasion et à l'hédonisme, écrit sous forte dose de LSD.  John Peel dira d’eux : « Même s’ils ne font pas d’autres albums, ils auront achevé là bien plus que nous tous au cours de notre vie. »[ii].  « Geek Love », tiré de la nouvelle de Katherine Dunn, traitant du milieu du cirque, inclura également quelques samples du film « Freak » de Todd Browning. Le single fut n°1 à sa sortie, Fire Records le plaça parmi les vingt meilleures chansons de tous les temps, et il permit au groupe de signer sur Ultimate, avant d’enchaîner de nombreux concerts, notamment avec The Telescopes ou Catherine Wheel. Pour Elisabeth Freeth : « On a fait quelques apparitions dans des émissions de télé et on a commencé à avoir pas mal de fans en Angleterre et ailleurs en Europe. C’était vraiment une période fantastique. »[iii]
Leur premier album, Eternal Hapiness sortira en 1994. Bien plus qu’un trip, il en sera la définition. Un véritable appel à l’évasion et à l'hédonisme, écrite sous forte dose de LSD. Lamp expliquera : « Je pense que la raison pour laquelle notre musique marche, c’est que nous naviguons dans des styles différents. (…) On a toujours dit qu’on devait se diversifier le plus possible. »[iv]
Stricto senso, on peut débattre longtemps pour savoir si ce groupe fait partie du shoegaze ou non. Un peu trop rock, un peu trop électro, peu importe, il y a la voix, et ce même attrait pour la surenchère. Ce qui est à noter, c’est que ces musiciens vivaient leur psychédélisme. Malheureusement, l’album n’eut aucun succès. Steve Eagles regrettera : « On a complètement oublié nos chansons. Elles n’ont jamais vu la lumière du jour et on avait presque fini par se convaincre qu’elles étaient perdues à jamais. »[v]. Un deuxième album, Amphibian en 1995, plus orienté rock, faisant la part belle aux guitares, n’y changera rien, Bang Bang Machine se sépare sans que personne ne s’en rende compte.



[i] Lamp, source illisible, [en ligne] https://www.facebook.com/Bang-Bang-Machine-171987049554681/photos/
[ii] Propos de John Peel rapportés par Kate Yates, [en ligne] https://www.facebook.com/Bang-Bang-Machine-171987049554681/photos/
[iii] Elisabeth Freeth citée par Kate Yates, op. cit.
[iv] Lamp cité par Ben Willmott, sur Pulse, 29 mai 1992, [en ligne] https://www.facebook.com/Bang-Bang-Machine-171987049554681/photos/
[v] Steve Eagle cité par Neil Watts sur Evesham Journal, [en ligne] https://www.facebook.com/Bang-Bang-Machine-171987049554681/photos/

21 août 2008

Fiche artiste de Levitation


Levitation

Mené par le tordu et génial Terry Bickers, ex-House of Love, la formation anglaise imposera au monde de la pop, ses codes et son univers très particulier. Malgré un arrêt soudain en 1994, suite au départ mouvementé de son leader, Levitation réussit là où beaucoup échouèrent : à savoir mettre en jeu et en lumière un panel vaste d’émotions, dans une démesure telle qu’elle se transforme en expérience.
« Levitation est le groupe qu’on a toujours rêvé de voir » dixit le Melody Maker.



18 août 2008

Fiche artiste des Smashing Orange



Smashing Orange

Ce groupe est à l’origine d’un improbable paradoxe : alors qu’il est un des pionniers de la vague shoegaze américaine, celui-ci est autant adulé en Angleterre qu’inconnu dans son propre pays !
Au début des années 90, Rob Montejo (chant et guitare), Rick Hodgson (guitare), Tim Supplee (batterie), et Stephen Wagner (basse) deviennent vite la coqueluche des médias anglais, comme NME ou Melody Maker. Et les premières années furent formidables : des concerts exceptionnels tous les soirs au Camden Falcon, des back stages mémorables avec les journalistes au cours desquels la drogue abondait, des sessions chez John Peel écoutées par des milliers de fans la nuit, des singles mythiques à la pelle, dont pourtant aucun ne fut sorti aux Etats-Unis ! Smashing Orange était devenu une sorte d’attraction, tout le monde désirant voir sur scène un groupe qui reprenait un style proche de My Bloody Valentine tout en y ajoutant une forte dose de psychédélisme sixties, avec des paroles crues et quelque peu porté sur le sexe, formation dont on regrettait également l’absence de Sara Montejo, petite sœur de seize ans, qui prêta sa voix sur certains morceaux mais qui n’était pas du voyage en Angleterre, la loi interdisant les mineurs de travailler.
De l’autre côté de l’Atlantique, et plus particulièrement dans le Cleveland dont ils sont originaires, personne n’a entendu parler des Smashing Orange. Le groupe espère donc compter sur une tournée en compagnie de Lush pour y faire décoller leur carrière, mais sans succès. En 1991, c’était l’année de Nirvana, et de personne d’autres.
Dès lors, Rob Montejo essaye de se plier aux modes et durcit le ton sur leur premier album « The Glass Bead Game ». Désireux d’être enfin reconnu, Smashing Orange signera par la suite un opus en 1994 produit par Jack Endino, toujours aussi psychédélique, mais plus proche du grunge. Seulement celui-ci ne sera pas très réussi et d’une qualité bien en deçà de ce que le groupe pouvait faire à leur tout début. Si bien que le groupe finit par se séparer dans l’anonymat le plus complet, aussi bien aux Etats-Unis qu’en Angleterre.
Fort heureusement, des rééditions permettent aujourd’hui de combler les lacunes.

12 août 2008

Seefeel : Polyfusia


Polyfusia de Seefeel

Indispensable !

Sortie : 1994
Produit par Seefeel
Label : Astralweeks


On nage.
Pour un peu, on aurait l’impression d’être enveloppée dans cette musique. C’en est presque physique. Le but n’est pas de se concentrer sur les mélodies, qui en réalité ne varient pas pendant plusieurs minutes, mais de donner une texture au silence et de recouvrir, via les oreilles, la totalité du corps. D’une incroyable douceur et texture vaporeuse, les premières chansons de Seefeel proposent un effet relaxant. De temps à autre, on se surprend à reconnaître ça et là quelques bidouillages électroniques, mais ce sont essentiellement les glissades sirupeuses des guitares, les claviers féeriques et les voix angéliques en arrière-fond qui relâchent les tensions et apaisent. La musique prendra l’allure d’une caresse sensuelle. Les répétitions des thèmes flirteront délicatement avec l’ambient tout juste naissant pour insuffler une torpeur presque magique, tant on a du mal à y croire. Les guitares sont employées de manière dérivée, samplées comme des chants de sirènes (« Moodswing »). Du moment qu’il reste discret et ne joue d’aucune nuance qui pourrait déranger l’état lunatique, le rythme soutient les morceaux, en une sorte de dub qui évite les contrastes captant l’attention, mais qui fait défiler les plages vers un froissement d’ailes de papillons.
On ferme les yeux et on se laisse enveloppé chaleureusement par cette musique divine, programmée en boucle ou en mode repeat, et d’une détente de l’ordre du mystique (le divin « Plainsong »). Difficile de croire qu’il y a des musiciens derrière tout ça : les voix sortent de l’irréel, les chansons sont essentiellement instrumentales et la volonté de parler, de paraître ou de se montrer est tout bonnement inexistante. Les nappes féeriques (le splendide et monumental « Minky Starmine »), à peine perturbées par des distorsions, effleurent les oreilles dans un calme aérien de toute beauté. Pour la toute première fois, l’organique se dissout, refond et renaît sous une nouvelle forme samplée, mais toujours aussi vivante, riche et pleine de mystères. A force de répéter les beats, l’esprit s’envole très loin, traversé de sonorités suaves : chœurs angéliques, clavier issu tout droit de la dream-pop, touches de synthé tombées des nuages, des plaintes de guitares, une batterie économique et bizarroïde, le tout enchevêtré de manière délicieuse et sans heurt.
Ce n’est pas du vide, mais au contraire de la densité : planante, mélodique, émotionnelle. Le voyage est flottant. Les guitares de « More Like Space » sont distordues comme le bruit des vagues, le rythme coule et le chant léger et mixé en retrait se fait aussi circonspect qu’une écume. Les vocalises féminines semblent surgir d’un monde situé au-delà de la réalité, au-delà même des simples mots pour les décrire. Ces marées de guitares inondent l’espace, le noient presque, en tout cas l’immergent dans une bulle.
Les premiers essais du groupe, rassemblés ici sur Polyfusia, auxquels s’additionnent des remixes produits par Aphex Twin himself, permettent de saisir la complexité et la majesté du détournement des instruments rock à des fins planantes et relaxantes. Tout est en suspension avec Seefeel, en grâce éperdue (les voix tristes et belles de « Time to find me »), succession fluide de longs titres d’une placidité troublante. Les souffles sont chaleureux, d’une lumière fragile, se mouvant par ondes sur une ligne de batterie lancinante, quasiment charnelle. Des pléiades d’interventions synthétiques ou de stries d’acier (les saturations mixées de « Come Alive », presque indus) donnent aux titres de la rondeur, de la plasticité, de l’évidence en réalité. Car, abandonné, on se retrouve devant un monde perplexe mais rassurant, dont la rencontre génère des sensations viscérales.
Probablement étrange, évidemment novateur, cette compilation essentielle ne cesse pourtant de façonner un univers nouveau pour celui qui sera prêt à mettre de côté pour un temps sa soif de réponses et de slogans, et qui cherchera ici un moyen de s’échapper. De quitter temporairement les frasques de la réalité pour rejoindre une chimère accueillante et bienveillante.

The Curtain Society : Life is long, still


Life is long, still de The Curtain Society

Sortie : 1996
Produit par The Curtain Society
Label : Bedazzled


On traverse la musique de The Curtain Society comme si, au final, il ne s’était rien passé. L’album file au fur et à mesure vers une abstraction, quelque chose de lent à se déliter, mais graduelle dans la perte des repères et des points de fixation.
La teneur de ces titres ne pourra donc exister ni avant, ni après, mais bien pendant l’écoute, car il s’agit, en laissant défiler ces secondes de béatitude égarée, de faire prendre naissance à des retenues, des slides lointains, des timidités, des fugues, des glissages, des coulées, qui en dehors s’effaceront bien vite. Les mélodies sont si lentes qu’elles ne font que glisser. Le déploiement vers l’extension est présent, laissant exploser les guitares, tout en évitant les vagues et un impact trop secouant. On a le sentiment dès lors de vivre des hallucinations, des apparitions fugaces, un brouillard de lyrisme languissant. The Curtain Society s’essouffle et en fait de l’art.
Le solo poignant à la fin de « Amber », le velouté des voix, l’éclatante et virevoltante pudeur étalée sur « Je regrette rien », l’aveu cinglant de défaite avec le court « I refuse », prononcé étonnamment doucement pour un propos neutre, la percussion effleurante de « Stealing Shakespeare » (et ses distorsions), bon nombre d’éléments élève l’esprit et le bouleverse, pour aussitôt s’effacer de la conscience, du fait de leur trop faible consistance matérielle. La musique des américains a atteint une telle légèreté qu’elle ne laisse plus de traces. Il ne subsiste que des échos, des vestiges de divagations monotones (« Apnea », les sept minutes expérimentales de « Higher Star ») ou des climats indolemment élégiaques. The Curtain Society peut parfois arriver à la réserve telle que l’annulation éteint la mesure des chansons, diminuant ainsi leur impact.
C’est aussi cette sortie vers l’absence de déclamations qui les mènera sur des sentiers somptueux (« Riverful »). Aboutissant à un paroxysme, non pas dans l’intensité, mais dans la majesté et l’élégance des tenues. L’incroyable finesse dans les additions des instruments les uns aux autres pour former un ensemble gracieux se prend comme une apparition inouïe («Mouthwithout » dont le riff lancinant et sirupeux est un délice suprême) dont il ne restera qu’un vague souvenir de quelque chose de sublimement plein.
De la même façon que cet album a mis beaucoup d’année pour sortir, arrivant du coup bien après les retentissements du mouvement shoegaze, The Curtain Society ne souhaite pas s’appesantir, mais s’étirer, se répandre, ruisseler, goutter et glouglouter, le temps d’une sublime chanson à la guitare sèche (« Life is long, still »), pour ensuite se retirer sur la pointe des pieds.