1 décembre 2008

The Naked Souls : Shady Ways Anticlockwise



Shady Ways Anticlockwise de The Naked SoulsCoup de coeur !Sortie : 1995
Produit par Giorgio Motore
Label : Lost Records

Si le merveilleux existait, The Naked Souls en signerait la BO. Volontiers affrété et surchargé de magnificences en tout genre, cet album est une pure merveille enchanteresse, qui pour une fois ne provient pas d’Angleterre mais de République Tchèque. Rien, absolument rien, ne semble s’affilier à quelque chose de terre-à-terre, de l’apanage de simples musiciens de studios, les membres de The Naked Souls sont des anges.
L’usage habituel dans le rock de rengaines ou de riffs percutant s’évanouit subitement devant la magie que peuvent exercer ces guitares en couches, en apparats, tissant des lignes mélodiques féeriques, qui voguent et tremblent, dans un style tout en rondeur. D’une suavité extrême, le mur du son qui se déploie se fait tout en recouvrement, enrobant l’espace au lieu de le saccager, pour une musique raffinée, dépositaire d’une ambiance proche de l’onirisme. Jamais on ne pensait qu’une telle beauté pouvait se faire dans le rock.
Les structures alambiquées et élégantes qui se dégagent de cet album aspirent à une infinie beauté, qui n’a plus grand-chose à voir avec le commun. Quelques clapotements et bouillonnement de clavier, évoquant des nappes aquatiques, des relents de pureté translucide, d’ondes et de fluides (« Auto-da-fé »), et c’est tout un écrin tropical qui s’offre pour des guitares mouvantes et au son tremblotant. Instaurant une ambiance délectable, sorte de liqueur ou d’ambroisie musicale, The Naked Souls se pare alors de tous ses atouts : une préciosité sans égale, à grand renfort de rythme lent, de basses froides et de samples de poudres de fées (« Heaven »), un style fantastique et très ampoulé, un chant quasi-théâtral, angélique, d’une gravité consistante et pourtant d’une légèreté incroyable, qui scande des litanies célestes avec un maniérisme langoureux ( « Seattle song »).
Un tel raffinement est une surprise, un choc mais aussi un plaisir sans fin, qui s’amplifie à mesure que la délicatesse se complexifie, au grès d’une voix d’enfant de chœur, d’une saturation (« Day after day »), d’un roulement de caisse, d’une basse délicate, d’un crescendo (« Shadow of the wave ») ou d’un passage qui se laisse aller (« Winter kills me »).

A la longue, le détachement est tel qu’on est persuadé que cette musique n’a pas d’équivalent sur Terre ; ce sont pourtant quatre garçons qui l’ont inventé et qui s’en portent garants. Mais durant quelques dizaines de minutes (soit la durée de l’album, plus sans doute plusieurs longs moments à suivre pour ceux qui aiment à rêvasser), l’illusion est suffisamment forte pour que l’on croie à un miracle. C’est que le symbole est fort : tout dans l’arrangement, les éclats, les mélodies, l’instrumentation, les retenues, est voué à se détacher des petitesses pour rejoindre le firmament des plaintes poétiques, dont la grâce est tellement poignante qu’elle étreint le cœur pour toujours.

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