8 septembre 2015

The Darling Buds : Erotica

Erotica de The Darling Buds

Sortie : 1992
Produit par Stephen Street
Label : Epic

Pour le troisième album, toujours sur la major appartenant à Sony, on retrouve les guitares, mais cette fois-ci le son est plus fort et bruyant. La pochette reprend les codes du shoegaze, comme une leçon d’école. Et la voix d’Andrea Lewis se fait sirupeuse. Ce n’est pas de la copie ou de la récupération mais juste une envie de se réinventer encore une fois. Andrea se justifie : « on a évolué depuis les huit ans qu’on est ensemble et on a pris pas mal d’influences de divers groupes. »[i]
Cet album, plutôt réussi, est lumineux. The Darling Buds a toujours été un groupe à guitare. Et quand on y réfléchit, finalement, sur cet album, le groupe ne se renie pas, au contraire. Leur son est plus ample, plus puissant, plus carré. Andrea confirme : « On a toujours été comme ça [avec un côté plus méchant et dur]. On a été laissé en autonomie pour cet album alors on a pu faire ce qu’on voulait. En concert, on sonne plus fort. On a gardé le côté mélodique mais on a clairement durci le son des guitares. On n’est pas juste un groupe pop. »[ii] L'écriture est au top, assurée et facile d'accès (pour du shoegaze), comme sur « Wave » ou le single « Sure Thing ». C’est même une excellente porte d’entrée pour le curieux qui souhaiterait se faire une idée du mouvement sans être rebuté. Les guitares sont certes dignes de My Bloody Valentine, Lush ou The Charlottes mais les chansons ne sont pas du tout agressives, grâce à une voix douce qui se superpose parfaitement au bruit ambiant, sans être obligée de se donner une contenance grave ou solennelle. Car c’est de la pop avant tout, qui ne se prend pas au sérieux et met l’accent sur les belles mélodies, faciles à retenir. Harley explique : « Andrea a des goûts très larges en matière de musique, ça peut aller de Ride à 10 000 Maniacs »[iii]. L’intéressée ne nie pas les influences, au contraire : « Il faut faire le tri parmi [les groupes de la scène Thames Valley] mais Lush, ils sont cool. On a demandé à faire une tournée avec eux. Ils n’ont pas l’air de trop galérer. Je pense que personne ne les attendait ! »[iv]. La seule différence, c'est que The Darling Buds est peut-être plus optimiste.
L’album garde sa cohérence et s’autorise même quelques prises de risques, comme la ballade « Gently Fall », passée au mixer, « Off the mind », estampillé The Cure ou « One things to another », véritable hommage au Loveless de My Bloody Valentine, avec sa guitare sèche, ses nappes glissantes comme si la bande magnétique avait chauffée au soleil et ses « ouhouhouh » répétitifs.
On retient des titres qui sont d'une richesse incroyable, ne conservant du shoegaze que le côté tourbillonnant. Erotica devient alors un album d'une énergie folle, une gerbe de lumière, un éclat.
Il aurait mérité un autre regard, une appréciation moins connotée, si on avait su à l'époque se focaliser sur la qualité d'écriture du groupe, toujours présente... 



[i] Interview d’Andrea Lewis par Dom Gourlay, sur Drowned in Sound, 21 aout 2015, [en ligne] http://drownedinsound.com/in_depth/4149263-we-treat-every-gig-as-if-its-our-last-one---dis-meets-the-darling-buds
[ii] Andrea Lewis cité par Mark Sutherland, sur Lime Lizard, septembre 1992, [en ligne] http://notsorted.tripod.com/DBarticles.html
[iii] Geraint « Harley » Farr sur White Limonade, date inconnue (1992 ?), [en ligne]  http://www.whitelemonade.net/one/bud-wiser
[iv] Andrea Lewis sur White Limonade, op. cit.


4 septembre 2015

Fiche artiste de 13th Hole

13th Hole

En 1992, exceptionnellement, les Transmusicales de Rennes font toute une programmation autour du label Rosebud, alors maison de disque locale et indépendante qui commençait à pointer le bout de son nez. Les dirigeants, souhaitant privilégier l'éclectisme, avaient toujours refusé d'accorder la primeur à des labels en particuliers, surtout parisien, mais ils n'ont su refuser lorsqu'ils ont vu ce label rennais metre un sacré coup de pied dans la fourmillère. Ils ont donc programmé 13th Hole (noisy-pop), Chelsea (twee-pop) et Katerine (du n'importe quoi) tout un vendredi après-midi. Pour promouvoir cet événement, on peut voir 13th Hole livrer une prestation sur la chaîne télé locale. Le résultats est significatif : un trio français qui ne faisait rien comme personne ! Une chanteuse hagarde qui regarde en l'air plutôt que la camera, deux garçons flanquées de leurs guitares et amoureux des distorsions, cet absence de posture détonne dans le plat paysage français des années 90. C'est que 13th Hole est en réalité amoureux de ce qui vient d'ailleurs, à commencer par My Bloody Valentine et (surtout) Sonic Youth. Donc inutile de dire qu'avec eux ça déménage ! Guitares noisy à tous les étages, voix dépassées, rythme à 100 à l'heure, le groupe mené par le rennais Stephan Le Scarnouec et l'italienne Isa Valenti font vriller les têtes !